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Îlots de chaleur - des idées pour rafraîchir nos villes

Vagues de chaleur, épisodes de canicule : ces dernières années, les citadins ont souvent tiré la langue au cours des mois d’été. Comment apporter un peu de fraîcheur au cœur des villes ? Plusieurs communes suisses ont empoigné le problème.

Texte Sylvie Ulmann
Publié le
31
/
05
/
2024
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Cet article à été réalisé en partenariat avec:

Les étés se suivent et les villes suisses étouffent toujours plus sous des îlots de chaleur, quand la température des centres urbains dépasse de plusieurs degrés celle relevée en périphérie (lire l’encadré). « Notre pays n’avait guère été confronté au problème, puis les choses se sont accélérées », constate Albane Ferraris, adjointe de direction au service d’urbanisme de la Ville de Genève. Résultat : les pouvoirs publics se mobilisent. La Cité de Calvin s’est ainsi dotée d’une stratégie climat en 2022, dans la continuité de celle du canton, lancée en 2019. L’ennui, c’est que les mesures les plus efficaces pour lutter contre les îlots de chaleur sont aussi les plus lentes à déployer leurs effets. Point de technologie miracle en effet, mais des « recettes » ancestrales : ombre, humidité, perméabilité des sols. Reste qu’un arbre met des années à gagner suffisamment de hauteur et d’ampleur pour véritablement produire de l’ombre. Dans l’intervalle, les municipalités doivent donc rivaliser d’imagination pour empêcher leur population de mourir de chaud au cœur de l’été.

Les pieds dans l’eau

Ainsi, à Genève, deux nouvelles piscines verront le jour, de même qu’une nouvelle plage, quai Wilson. On prévoit également de réaménager les bains sur le Rhône et d’en créer de nouveaux à côté du jet d’eau. « Favoriser l’accès au lac est une mesure très efficace, idéalement en mobilité douce », confirme Martine Rebetez, climatologue et professeure à l’Université de Neuchâtel et à l’Institut fédéral de recherches sur la forêt, la neige et le paysage (WSL). Mais, là encore, il faudra prendre son mal à patience avant de pouvoir piquer une tête dans ces nouveaux aménagements à qui il faudra plusieurs années pour prendre forme. Alors, pour offrir plus rapidement des zones de fraîcheur aux citadins, on a fait preuve d’inventivité au bout du Léman. L’an dernier, avec le concours de la Haute École du paysage, d’ingénierie et d’architecture de Genève (HEPIA), des oasis urbaines ont vu le jour : « De juin à octobre, ces petits refuges mobiles se déplacent dans des zones définies avec le médecin cantonal, où les personnes âgées ou précaires sont plus nombreuses. Ces dernières peuvent venir se reposer à l’ombre et parfois bénéficier d’un apport d’eau », détaille Albane Ferraris. Une manière aussi de créer du lien, car ces hausses de température s’accompagnent d’effets secondaires inattendus, tels que l’isolement des seniors. « On leur recommande en effet de rester chez eux lorsqu’il fait très chaud ! » souligne-t-elle.

Autre mesure à moyen terme : faire resurgir les rivières urbaines. « Beaucoup ont été recouvertes au début du XXe siècle pour gagner de l’espace de construction », rappelle Martine Rebetez. À Neuchâtel, ce fut le cas pour le Seyon, qui coule désormais à ciel ouvert. À Genève, d’ici quatre ou cinq ans, la Drize devrait revoir le jour dans le secteur Praille – Acacia  – Vernets, en pleine redéfinition.

À Monthey, moins de béton, plus de verdure

À Monthey, en Valais, une autre stratégie a été imaginée pour créer des îlots de fraîcheur, comme l’explique Stéphane Coppey, président de la commune. « Nous avons dégrappé 750  m2 de goudron sur l’avenue de la Gare, pour les végétaliser et les rendre perméables. Par ailleurs, 110 places de parc ont été supprimées dans le centre-ville, au profit d’arbres, de massifs et d’une petite place agrémentée de jeux d’eau. » La démarche, qui a suscité beaucoup d’intérêt et de visites, pourrait faire des émules. Seule ombre au tableau : ces espaces sont plus chers à entretenir qu’une rue bétonnée. La cité valaisanne, qui est en train de revoir son plan de zones, a néanmoins décidé d’inclure davantage d’espaces verts – un troisième parc est ainsi en projet, ainsi qu’une « voie verte » qui reliera le coteau au Rhône, grâce à un maillon de mobilité douce arborisée. « Nous avons en outre opté pour la biodiversité et ensemençons les pieds des arbres avec une sélection de plantes indigènes spécifiques à Monthey. De plus, nous varions les essences des arbres d’avenue afin de favoriser la faune et la flore et d’éviter qu’une maladie ne décime tout un secteur », souligne Stéphane Coppey. Un bon point, confirme Martine Rebetez, qui rappelle l’importance de miser sur les bonnes variétés : « Aux pins, connus pour leur effet réchauffant, on préférera ainsi des feuillus, et l’on choisira des essences adaptées au climat. Leur couronne doit être assez fournie et leurs racines disposer de suffisamment d’eau pour apporter une véritable fraîcheur. »

S’inspirer des villes du Sud?

Se pose encore la question du bâti, principal responsable des îlots de chaleur urbains. « Une ville, ce sont des masses de béton et de bitume qui se chargent en chaleur durant la journée et la restituent la nuit », résume Lionel Fontannaz, de MétéoSuisse. Un effet accentué par la teinte des façades et des toitures, souvent sombres sous nos latitudes. « Les cités du Sud ne sont pas blanches pour rien ! » relève Albane Ferraris. Les études scientifiques le démontrent : l’al-bedo – le pouvoir réfléchissant d’une surface – est un levier très efficace pour faire descendre la température. Elle poursuit : « Pour le moment, des questions de culture du bâti compliquent toute intervention sur la couleur des bâtiments. » En Valais, on a contourné le problème en s’attaquant aux routes : « Le canton teste des revêtements plus clairs que le bitume habituel », précise Lionel Fontannaz. Il ajoute que la qualité du bâti joue également un rôle : « On supporte mieux une situation de forte chaleur dans un bâtiment Minergie que dans un petit appartement mal isolé et non traversant. » Avis aux propriétaires !

Avis au monde politique aussi… Ainsi, à Monthey, ce n’est pas un hasard si les choses avancent au pas de course : « Tous les partis soutiennent la démarche », se félicite Stéphane Coppey. Ces préoccupations sont ainsi intégrées dans toutes les réflexions, du réaménagement de la zone sportive, qui mise sur la perméabilité du sol et l’intégration de la mobilité douce, à la construction d’un nouveau centre scolaire, où l’on évite de totalement goudronner les préaux.

Îlots de chaleur, késaco ?

« On appelle îlots de chaleur ces zones dans lesquelles la température monte à cause des constructions », résume la climatologue Martine Rebetez. À Neuchâtel, où une trentaine de capteurs ont été posés, la différence entre zones bétonnées et zones arborisées atteignait 3 à 4°C en situation de canicule. « Dans certaines régions, elle avoisine les 7°C », souligne Lionel Fontannaz, de MétéoSuisse. « On peut pointer l’urbanisation du doigt, mais le réchauffement accentue le phénomène », relève le spécialiste. Avec, pour conséquence, des problèmes de santé publique : des nuits dites tropicales, où la température ne descend pas au-dessous de 20°C, et trop courtes pour que l’on puisse se reposer vraiment, avec un risque de mortalité qui augmente. « La vague de chaleur de 2003 avait fait 1000 morts en Suisse, celle de 2022, 650 », rappelle Martine Rebetez. Le chiffre, certes en baisse, demeure conséquent.

Îlots de chaleur, késaco ?

« On appelle îlots de chaleur ces zones dans lesquelles la température monte à cause des constructions », résume la climatologue Martine Rebetez. À Neuchâtel, où une trentaine de capteurs ont été posés, la différence entre zones bétonnées et zones arborisées atteignait 3 à 4°C en situation de canicule. « Dans certaines régions, elle avoisine les 7°C », souligne Lionel Fontannaz, de MétéoSuisse. « On peut pointer l’urbanisation du doigt, mais le réchauffement accentue le phénomène », relève le spécialiste. Avec, pour conséquence, des problèmes de santé publique : des nuits dites tropicales, où la température ne descend pas au-dessous de 20°C, et trop courtes pour que l’on puisse se reposer vraiment, avec un risque de mortalité qui augmente. « La vague de chaleur de 2003 avait fait 1000 morts en Suisse, celle de 2022, 650 », rappelle Martine Rebetez. Le chiffre, certes en baisse, demeure conséquent.

Nombre de nuits et journées tropicales, à l’exemple de Zürich Kaserne (urbain) et de Zürich Affoltern (rural) 
Source : Météosuisse

Également disponible dans:
N° 3 - Mai 2024
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