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L’innovation au cœur de la transition agricole

Comment concilier productivité agricole et protection de l’environnement ? C’est l’un des défis auxquels est confronté le secteur de l’agriculture, dont le modèle s’apprête sans doute à connaître sa plus profonde évolution. Un contexte dans lequel l’innovation a un rôle majeur à jouer, de la graine à l’assiette.

Texte Élodie Maître-Arnaud
Publié le
31
/
05
/
2024
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Cet article à été réalisé en partenariat avec:

Aucune génération d’agriculteurs n’a jamais eu à opérer de tels changements ! » affirme Stéphane Fankhauser, fondateur et directeur de l’Agropôle. Croissance démographique, dégradation des terres arables, changement climatique ou encore durcissement des normes environnementales : la transition vers une agriculture plus résiliente et plus durable est devenue indispensable pour assurer la sécurité alimentaire mondiale et préserver la planète. Elle devrait aussi être compatible avec une meilleure qualité de vie pour les agriculteurs.

On estime aujourd’hui à un peu plus de 13% la part des émissions de gaz à effet de serre imputable à l’agriculture en Suisse. Le secteur a également un impact sur les ressources primaires (eau, oligoéléments présents dans les sols, pollution des terres, etc.) et sur la consommation d’énergie. « Mais si l’agriculture pèse elle-même de façon importante sur l’environnement, c’est aussi le climat qui nous force à changer », relève l’expert. « Et je ne suis pas certain que le monde agricole ait vraiment conscience de la vitesse à laquelle son support de production évolue. Produire toujours davantage pour moins cher, avec un impact de plus en plus élevé, c’est un suicide collectif ! »

Aux antipodes de cela, l’agroécologie exige non seulement de s’appuyer sur des méthodes et techniques ayant moins d’effets néfastes sur l’environnement, mais aussi de s’adapter aux modifications de celui-ci. Pour relever ces défis et opérer sa transition, le secteur agricole peut notamment s’appuyer sur de nombreuses solutions innovantes, déjà à disposition sur le marché.

La Suisse comme démonstrateur mondial des agritechs ?

Au cœur du Jura – Nord vaudois, le campus Agropôle entend ainsi mettre la technologie au service de l’agriculture durable. Terrain d’essai grandeur nature, il accueille de nombreux acteurs développant des solutions innovantes pour améliorer l’agriculture traditionnelle. Selon Stéphane Fankhauser, la Suisse dispose d’ores et déjà de nombreuses technologies pour bien faire, et pourrait devenir une sorte de « démonstrateur mondial » des agritechs ou technologies agricoles. Robotisation, intelligence artificielle, agriculture de précision, agrivoltaïque ou encore aéroponie : diverses technologies peuvent en effet permettre d’augmenter les rendements, de faciliter le travail, de réduire l’utilisation de produits chimiques, de diminuer la consommation d’eau et d’énergie ou encore d’améliorer l’état des sols ou le bien-être des animaux (voir les exemples ci-dessous). Et ce, sur l’ensemble de la chaîne de valeur agro-alimentaire. Des semences aux produits phytosanitaires et engrais en passant par les méthodes de production et de récolte jusqu’à la transformation des denrées, la transition agricole nécessite en effet une approche transversale. « Les producteurs, les distributeurs, mais aussi les consommateurs et les milieux politiques ont tous un morceau de la réponse ! » souligne l’expert.

Il déplore toutefois le fait que personne ne semble prêt à « payer la facture » pour adopter sans tarder les technologies existantes, souvent coûteuses. Et de plaider pour un support financier de nos agriculteurs, afin de mettre ces technologies à leur disposition et de réaliser ainsi rapidement des économies d’énergie massives, tout en limitant l’impact de l’agriculture sur l’environnement. « On est encore à cheval entre l’économie de compétition et la prise de conscience de la crise environnementale ; c’est notre plus grand challenge ! » Selon lui, l’agriculture ne pourra pas non plus opérer sa transition durable sans l’engagement simultané de certains lobbys – dont il doute cependant de l’intérêt à ce que les choses changent – et sans l’appui de l’opinion publique. « C’est aussi une question d’éducation du consommateur : bien se nourrir est bon non seulement pour la planète, mais aussi pour la santé », conclut Stéphane Fankhauser.

Quelques chiffres

50 039

Le nombre d’exploitations agricoles en Suisse en 2019 (contre 111 302 en 1975)

4,5

En milliards de francs, c’est la valeur ajoutée brute générée par le secteur de l’agriculture en Suisse (soit 0,6% de la VAB totale).

59%

La part de denrées alimentaires consom-mées en Suisse provenant de la production agricole indigène.

13,2%

La part des émissions de gaz à effet de serre imputable à l’agriculture en Suisse.

33%

L’objectif de baisse des émissions de CO2 d’ici à 2050 dans l’agriculture suisse.

Source : « Les agritech en Suisse. La panacée pour concilier productivité et protection du climat ? » Dossier thématique CleantechAlps

Quelques chiffres

50 039

Le nombre d’exploitations agricoles en Suisse en 2019 (contre 111 302 en 1975)

4,5

En milliards de francs, c’est la valeur ajoutée brute générée par le secteur de l’agriculture en Suisse (soit 0,6% de la VAB totale).

59%

La part de denrées alimentaires consom-mées en Suisse provenant de la production agricole indigène.

13,2%

La part des émissions de gaz à effet de serre imputable à l’agriculture en Suisse.

33%

L’objectif de baisse des émissions de CO2 d’ici à 2050 dans l’agriculture suisse.

Source : « Les agritech en Suisse. La panacée pour concilier productivité et protection du climat ? » Dossier thématique CleantechAlps

DIMINUER L’IMPACT CO2 DES PRODUCTIONS MARAÎCHÈRES SOUS SERRES

Basée à Neuchâtel, Infrascreen propose une nanotechnologie de pointe pour améliorer la durabilité des cultures. L’entreprise a été fondée en 2019.

Objectif. La grande majorité des tomates, concombres et poivrons frais consommés en Europe sont produits dans des serres, chauffées au gaz naturel pendant la saison froide dans les régions septentrionales. Le chauffage représente environ 30% des coûts d’exploitation de ces exploitations et émet d’importantes quantités de CO2. Infrascreen entend contribuer à améliorer l’efficience énergétique de ces serres high-tech.

Technologie. Infrascreen a développé un écran thermique transparent retenant la chaleur radiative à l’intérieur des serres, tout en permettant le passage de la lumière indispensable à la photosynthèse des plantes. Ses propriétés isolantes permettent ainsi de diminuer la consommation d’énergie annuelle de 20% par rapport à un écran thermique classique, soit 1000 tonnes d’équivalent CO2 par hectare installé.

Maturité. L’écran Infrascreen est disponible sur le marché ; il équipe d’ores et déjà de nombreuses serres high-tech en Europe, aux États-Unis et au Canada.

OPTIMISER LES TRAITEMENTS PHYTOSANITAIRES

Fondée en 2014, Ecorobotix développe des logiciels d’intelligence artificielle permettant de limiter l’impact de l’agriculture sur l’environnement. Elle est basée à Yverdon-les-Bains.

Objectif. Dans un contexte réglementaire de plus en plus strict quant à l’utilisation de produits phytosanitaires, Ecorobotix offre une solution permettant de réduire drastiquement le recours aux herbicides, fongicides, insecticides et engrais.

Technologie. Basé sur l’intelligence artificielle, le pulvérisateur ARA est capable de reconnaître les plantes et de les classer en temps réel afin de distinguer les mauvaises herbes des cultures. Il permet ainsi d’appliquer uniquement la quantité de produit phytosanitaire nécessaire avec une précision de 6x6 cm, au rythme de 4 hectares par heure. Résultat : jusqu’à 95% de produits chimiques en moins, selon les cultures.

Maturité. Ecorobotix a développé des algorithmes adaptés à une grande variété de cultures, et poursuit ses travaux en ce sens. La technologie ARA est commercialisée en Europe, aux États-Unis (où l’entreprise a créé une filiale), en Amérique du Sud et au Canada. L’entreprise concentre ses efforts sur les exploitations de taille moyenne spécialisées dans les cultures à forte valeur ajoutée.

FACILITER LA TAILLE DE LA VIGNE

L’entreprise sierroise 3D2cut a mis au point une technologie permettant de tailler la vigne dans les règles de l’art, sans spécialisation particulière. Elle est active depuis 2019.

Objectif. Tailler convenablement la vigne est un travail d’expert qui permet de réduire considérablement le taux de mortalité des plants et d’augmenter leur productivité. Face à la pénurie

de tailleurs professionnels, 3D2cut a développé un système de reconnaissance de la vigne et d’aide à la taille.

Technologie. L’intelligence artificielle développée par 3D2cut est capable de reconstituer le jumeau numérique d’un cep de vigne et d’indiquer les endroits où tailler afin de ne pas affecter la vitalité des plants, tout en préservant les objectifs de production. Elle peut être intégrée dans n’importe quelle plateforme de gestion de vignobles, drone, lunettes de réalité augmentée, caméra, smartphone ou encore robot industriel.

Maturité. La phase pilote a permis de démontrer l’efficacité du logiciel. D’ici à début 2025, une version industrielle devrait être intégrable dans tous les dispositifs précités. Une levée de fonds est en cours pour amener le produit à maturité commerciale.

RÉDUIRE LES ÉMISSIONS POLLUANTES DES ÉLEVAGES BOVINS

Une vache émet jusqu’à 500 litres de méthane par jour. Fondée à Bière en 2006, Agolin a développé un additif alimentaire à base de plantes qui permet de lutter contre la production de ce gaz à effet de serre.

Objectif. Les fondateurs d’Agolin cherchaient avant tout à améliorer la performance des vaches laitières en agissant sur leur digestion, car les émissions de méthane constituent pour elles une perte d’énergie. La diminution de ces émissions est un effet secondaire positif pour l’environnement.

Technologie. Agolin Ruminant est un mélange d’extraits de plantes qui, ajouté à l’alimentation des bovins, permet d’en optimiser la consommation et l’assimilation. Pas moins de 23 études, menées sur quelque 4000 vaches, ont ainsi permis de démontrer une diminution des émissions de méthane de 8,8% par tête de bétail, grâce à une réduction du stress nutritionnel chez les ruminants.

Maturité. Deux millions de vaches dans le monde reçoivent aujourd’hui de l’Agolin Ruminant, principalement en Europe de l’Ouest et en Amérique du Nord. En Suisse, un projet mené par la coopérative Mooh doit permettre de réduire de 400 kg d’équivalent CO2 les émissions par vache et par an, grâce à ce complément alimentaire.

Également disponible dans:
N° 3 - Mai 2024
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